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27.2.14

Les étoiles de Burning Man


Je me faisais couler un bain bouillant pour laver mon esprit d'une journée de triste labeur. L'hiver 2007 était très froid à Paris.

Cette habitude date de mon enfance.  Je me plonge dans l'eau tout entier et seul mon nez dépasse.  Je peux rester ainsi pendant des heures.  C'est une forme de méditation.

Mais pendant que l'eau coulait le téléphone a sonné.  C'était mon ami Dan.  Surexcité.

"Tu fais quoi?", me demande-t-il,
"Suis occupé là."
"Faut que je te vois tout de suite."
"Pas maintenant."
"C'est important mon pote.  Très important.  Je suis pas loin de chez toi.  J'arrive." 



Trente minutes plus tard je le retrouvais donc au café du coin.  Il m'attendait à une table.  Le bougre ne tenait pas en place.  Des étincelles lui jaillissaient des yeux.

Dan et moi on est potes depuis toujours.  Nous sommes très proches.  Je connais tous les détails de sa vie décousue et il est au courant de mes penchants les plus déviants.

C'est un avocat toujours tiré à quatre épingles.  Un look d'aristocrate anglais, avec costume trois pièces et montre à gousset.  Mais il est dix fois plus allumé que moi.  La décadence est sa religion.  Il cache très bien son jeu.

Il est immédiatement entré dans le vif du sujet:

"T'as déjà entendu parler de Burning Man?"
"De quoi??"
"On m'en a parlé hier.  J'ai passé la journée au bureau à regarder des vidéos sur Youtube.  C'est un festival dans le désert du Nevada.  Un truc de dingue fils!  Faut qu'on y aille.  Je t'ai pris un billet."

Dan m'a convaincu en dix minutes mais a continué d'en parler pendant deux heures.  Je l'avais déjà vu très excité.  Jamais à ce point.

Deux semaines plus tard les billets d'avion étaient bookés.  Le camping-car, réservé.  Un copain de San Francisco s'était engagé à nous fournir en herbe, ecstas et champignons une fois sur place.  Les quantités seraient considérables.  Ca ne posait aucun problème.  L'affaire était rondement menée.

Et quand l'été est arrivé nous nous sommes retrouvés, comme prévu, en plein désert.

(Burning Man)

















Burning Man est un truc unique au monde.

Une ville de 80 000 personnes qui se construit d'un coup.  Comme ça.  Au milieu de nulle part. Un rassemblement survolté de fêtards acharnés et d'artistes déjantés.

Dan et moi avions deux objectifs: assister aux meilleures fêtes au monde, et surtout niquer comme des lapins.

Les deux premiers jours ont dépassé toutes nos espérances.  C'était une orgie de sexe et de musique.  On rencontrait des poules à longueur de journée.  Je n'avais jamais autant niqué de ma vie.  Dan les ramenait dans le camping-car mais je préférais la baise nomade, sous les tentes des filles.

Je me souviens bien de la première sur laquelle je suis tombé.

Elle avait la peau très claire, ne portait qu'un petit string, des bottes noires et une perruque rouge.  Tatouée de la tête aux pieds.  Je l'ai rencontrée le premier soir et en dix minutes nos organes s'emboîtaient.

On a baisé sur le toit de son camping-car.  Sous les étoiles et les ecstas.  C'était magnifique.

Les gens dansaient au loin et on niquait au rythme de la musique.  Les étoiles brillaient très fort.  On avait l'impression d'être dans l'espace.  Le désert donnait au paysage un aspect lunaire.  Je levais constamment les yeux vers le ciel en espérant y distinguer notre bonne vieille Terre.

Dès qu'on a terminé elle a sauté du toit, s'est vautrée quelques mètres plus bas et est partie en courant pour rejoindre la fête.  Elle a disparu dans l'obscurité du désert.  Je ne l'ai pas revue. Je ne l'oublierai jamais.




Sa chute m'avait déclenché un fou-rire qui ne semblait pas vouloir s'arrêter.  Ca a duré au moins deux heures. Ou deux minutes.  Je ne sais pas.

Mais j'ai dansé le reste de la nuit et je n'avais jamais ressenti une telle sensation de bonheur. Du pur bonheur.  Quand le soleil s'est levé derrière les montagnes c'était splendide et j'en ai pleuré de joie.

Je voulais voir Dan à tout prix.  J'ai donc pédalé vers notre camping-car en espérant l'y trouver.  Il fumait un pétard en prenant le soleil, allongé sur le sable.  Le coquin avait une fille complètement nue à ses côtés.

Visiblement lui non-plus n'avait pas beaucoup dormi.  Il s'est levé péniblement, a titubé dans ma direction et m'est tombé dans les bras.  "Mec, C'EST OUF!!", a-t-il hurlé comme si j'étais à l'autre bout du désert.  "Je sais!"

Nos "voisins" observaient cette scène en souriant.  Ils nous ont invités à les rejoindre sous leur tente.  Une tente géante, façon bédouin.

Une vingtaine de personnes se faisaient tourner des bangs à l'intérieur en buvant du thé saupoudré de cocaïne.  Ils venaient tous de Lake Tahoe, dans le Nevada.

Les profils étaient très variés: un marathonien qui ne pouvait pas fumer d'herbe avait apporté son vaporisateur haut-de-gamme.

Un professeur d'économie se trimballait à poil en déclamant des poèmes.

Deux filles déguisées en comtesses se roulaient des pelles au fond d'un canapé et une autre, très studieuse, écrivait à son petit bureau de bois.

Sa copine dormait à terre, nue, après une nuit qu'on imagine agitée.




Ainsi commençait le premier jour d'une expérience qui a déterminé ma vie pour les années qui ont suivies.

Vous ne pouvez rien acheter à Burning Man.  Même pas de l'eau.  Il faut donc l'économiser et personne ne se douche.  Après deux jours tout le monde pue.  Plus personne ne baise.  Le sexe n'est plus une option.  C'est alors seulement que Dan et moi avons vraiment commencé à vivre ce festival.

Burning Man est organisé comme une grande ville, avec ses rues, son centre et ses périphéries.  Mais c'est une anti-ville, par le contrat implicite qui lie ses habitants.

Dans la "vraie vie" nous élevons un mur entre nous-même et le monde.  Pour se protéger des autres.  De l'image qu'ils nous renvoient de nous-mêmes.  On préserve ainsi son petit égo et des certitudes qui n'en sont pas.

On juge avec médisance pour se prémunir du jugement d'autrui.  On protège des certitudes incertaines en les faisant passer pour des forces.  Et on se renferme sur soi.  On devient con et aigri.  On passe à côté de sa vie.

Les habitants de Burning Man font le choix, pour une semaine, d'inverser ces réactions.  Plutôt que de se défier de l'autre à-priori, ils se livrent à lui.  Complètement.  Et ça change tout.

On délaisse son égo rigide et ses convictions bancales pour s'ouvrir l'esprit.  Pour écouter l'autre, sans chercher à le juger.  Ni à se mettre en avant.  Et on apprend.  On apprend beaucoup.

Vous marchez dans les rues de sable et des gens viennent vous parler spontanément.  Parce qu'ils en ont envie.  Des filles viennent vous embrasser sans raison.  Parce qu'elles en ont envie.  Des êtres vous confient leurs souffrances les plus profondes parce qu'il n'y a rien qui réchauffe le coeur comme une oreille humaine.

Burning Man créé ainsi une société extrêmement moderne parce qu'elle se défait du poids des sociétés passées.  De la peur qu'on nous apprend dès l'école.  Du regard de l'autre, qui juge et qui définit ce qui est attendu de nous.  Qui dicte nos actions.  Et confisque nos vies.

Les gens deviennent ceux qu'ils sont vraiment pour une semaine et appellent cet endoit perdu dans le désert "leur maison".  Parce que leur autre maison, celle qu'ils habitent le reste de l'année, leur impose une multitude de contraintes qui les empêchent de se réaliser pleinement. Elle leur interdit d'être en contact avec leur véritable nature.  Leur nature humaine.

Un autre aspect essentiel: Burning Man se termine par un feu géant.  Tout brûle.  Rien ne reste.



On passe ainsi la semaine avec la certitude que tout va disparaître.  Que c'est éphémère.  Que tout sera réduit en cendre au terme de l'expérience.

Un peu comme la vie non?  Mais dans le tourbillon de l'existence il est très facile de négliger le fait que tout finira par s'arrêter.  Et d'oublier de vraiment vivre avant de mourir.

Cette certitude de la fin donne à chacun une énergie considérable.  Parce qu'on veut remplir ce vide par un trop-plein de vie.  On prend conscience de la fragilité de l'expérience et de l'existence.  Et on s'acharne, ensemble, à lui donner un peu de poids en la remplissant de joie, d'amour et de bonheur.

Burning Man n'est rien d'autre que la vie telle qu'elle se passerait si on avait pleinement conscience de sa mort.  Une vie qui nous ressemble vraiment.  Une vie vécue à 100%.

Dan et moi regardions la ville brûler depuis le toit du camping-car et j'ai compris mes erreurs passées.  Les concessions faîtes à ma liberté.  A mon individualité.  Et j'ai décidé de tout changer.

De quitter un job que je détestais pour faire ce dont j'avais vraiment envie.  De quitter le pays où je ne vivais que parce que j'y étais né pour déménager vers un autre qui me ressemblait davantage.  De me débarrasser de peurs qui inhibent et de préjugés qui abrutissent.

Et de remettre à leurs places le bonheur et la liberté: au centre de ma vie.

Je savais que ça n'allait pas être facile.  Que j'allais souffrir sur le chemin.  Que des gens seraient déçus.  Mais la vie passe vite et je voulais vivre la mienne.


The Moon Song by Karen O on Grooveshark
"I'm lying on the moon
My dear, I'll be there soon
It's a quiet and starry place (...)
In space we're here a million miles away"
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20.2.14

Sexe à Amsterdam


Je venais de démissioner.  L'angoisse me bouffait désormais toutes mes forces.

Mes journées consistaient essentiellement à regarder passer les heures dans ma petite chambre parisienne.

J'observais parfois la lumière du soleil filtrer à travers le rideau bleu marine.  Elle révélait de petites tâches.  Des tâches de sperme.  On aurait dit des îles qui se détachaient sur l'océan bleu du rideau.  Je scrutais, pensif, la carte de ma misère.




La mélancolie ne m'avait même pas laissé une petite serviette dédiée à la masturbation. J'éjaculais simplement sur le rideau à longueur de journées.  Il fallait bien se rendre à l'évidence: la dépression commençait à s'installer.

Je refusais de voir mes amis.  Ma copine de l'époque avait déménagé en Suisse.  J'étais censé la rejoindre mais je faisais trainer les choses.  Mon rideau de sperme séché a fini par me convaincre qu'il était temps de partir.

Au début ça n'allait pas trop mal.  Un peu mieux même.  Quand elle rentrait le soir mon angoisse me laissait un peu de répit et c'était très agréable.

Mais ça n'a pas duré.

Juste après avoir emménagé je me suis aperçu qu'elle me trompait avec un de ses collègues.  J'ai craqué.  Je n'avais plus de boulot.  Plus d'envie.  J'attaquais la dernière moitié de la vingtaine sans le moindre plan de vie.  Et ma copine adultère venait compléter un tableau déjà pas très glorieux.

Je ne lui ai pas dit que je savais.  Elle devait partir pour une semaine et je planifiais consciencieusement quelques jours de débauche vengeresse.

Gentleman, je l'ai accompagnée à l'aéroport de Genève le jour de son départ.  Embrassée tendrement en lui souhaitant bon voyage.  Puis je suis rentré à la maison, j'ai jeté quelques affaires dans un sac de sport et j'ai pris la route pour Amsterdam.

Faire de la route est un vrai plaisir.  Il existe un romantisme mystérieux à voyager sur de longues distances.  Quelque chose d'exaltant qui incite au rêve et donne envie de pousser la musique à fond.  Mais aujourd'hui c'était différent.  La peur des lendemains et mon désastre sentimental me coupaient toute envie.  Un silence de mort régnait dans la voiture ainsi que dans ma tête.

Et puis il s'agissait quand même de traverser la Belgique.  L'après-midi commençait à peine mais il faisait déjà presque nuit.  Le ciel était noir.  Le paysage désolé défilait lentement sous mes yeux.  J'avais l'impression de conduire vers nulle part.  A travers des champs lugubres et trempés de larmes.  Ce trajet ressemblait de plus en plus à ma misérable existence.

Les sinistres kilomètres s'enchaînaient les uns après les autres.  Ils me faisaient ruminer le passé, détester le présent et craindre l'avenir.  J'avais de plus en plus de mal à respirer.  Je me sentais emprisonné par le vide.  Et pour la première fois de ma vie j'ai été foudroyé par une crise de panique.  Une vraie.

C'est de très loin la pire sensation que je connaisse.  Votre respiration se coupe.  Votre coeur bat à cent à l'heure.  La réalité se change en cauchemar.  Vous sentez votre corps vous lâcher et je pensais vraiment être en train de mourir.  En Belgique.  Je ne voulais pas mourir en Belgique.

La crise a peut-être duré vingt minutes et il m'a fallu m'assoupir quelques heures avant de pouvoir reprendre la route.  Terrifié par le fait que ça puisse recommencer.  Mais quand même impatient de découvrir Amsterdam.

Je suis arrivé en pleine nuit et me suis trouvé une petite chambre sans chauffage dans un petit hôtel bon marché.

Le lendemain j'ai erré toute la journée à travers les rues de la Venise du Nord.  Cette ville est une splendeur.  Je n'avais jamais rien vu d'aussi beau.  Je me suis promis d'y retourner un jour avec une personne que j'aimerai.

Je déambulais entre les canaux en fumant pétard sur pétard.  J'entrais dans chaque bar que je trouvais et y buvais quelques bières.  J'étais complètement défoncé.  Et toujours angoissé.  Mais je ressentais aussi quelque chose de bizarre.  Quelque chose qui ressemblait à du bonheur.  Je me suis évanoui sur un banc et je crois bien que mes lèvres dessinaient un sourire.

Le soir tombait. Je commençais à reprendre mes esprits.  L'heure de ma vengeance approchait.  Elle serait délicieuse et beignée de lumières rouges.

J'avais la vingtaine innocente vous savez.  Aller voir une PROSTITUÉE me faisait peur.  Ça me mettait très mal à l'aise.  Je jetais des coups d'oeil timides dans chaque vitrine parce que je sentais que les badauds me regardaient comme un gros dégueulasse.  Ce n'était évidemment que mon imagination.  La renommée du Red Light District ne tient pas à la pureté de ses moeurs.




Deux filles m'intéressaient tout particulièrement.  Une très belle brune dont la vitrine se trouvait dans une rue bondée.  Et une blonde vraiment sexy quelques rues plus loin.  Mon choix a été celui de la discrétion.  Mon pénis, tel la baguette d'un sourcier, me guidait fermement vers la seconde.

Mon coeur battait la chamade et j'ai finalement poussé la porte de la blonde aguicheuse pour pénétrer sous ses lumières rouges.

"It's 50 euros for 20 minutes.  If you also want to touch me it's 75".

J'étais au chômage.  Fauché comme les blés.  Le sexe sans les mains fera l'affaire.

Elle ne portait qu'un sting noir et de hautes chaussettes en laine.  Ce type de chaussettes est un fantasme depuis ma puberté.  Mon pantalon s'est vite retrouvé sur les miennes.  J'étais très excité.

Mon hôtesse a étendu une serviette sur le lit et elle m'invitait à m'allonger.  Elle s'est mis à me sucer avec sa petite bouche et ses petites mains.  Tous mes problèmes disparaissaient peu à peu.  Elle pompait mon désespoir hors de mes entrailles et j'aurais pu l'épouser sur le champ.

Mais je sentais bien qu'il était plus convenable de la retourner sur le ventre pour la prendre par derrière.  Pourtant, ma duclinée s'y opposait.


"For doggystyle it's 75 euros.  You have to pay more".


Ce sera donc du sexe en étoile de mer.  Très bien.  Elle s'est mise sur le dos les jambes écartées et je me suis activé.  Mais les aiguilles tournaient très vite et elle m'a indiqué que sa prestation touchait à sa fin.  Beaucoup trop tôt pour une bite emballée sous plastique.

"Wait, I'm almost there" ai-je supplié. 
"No.  Your time is up.  You pay more or you get out".  Et elle se lève en tendant la main.

J'ai immédiatement retiré la capote et entrepris de me branler frénétiquement mais ce n'était pas du goût de la belle blonde.

"You get out!  I'll open the curtain and everybody will see you.  Out!"

Il a fallu tout remballer et quitter ma bien-aimée avec une trique d'enfer.  Ma troisième jambe me faisait boiter le long du canal et c'est la démarche mal assurée que je me suis précipité vers la seconde vitrine.

La petite rue était noire de monde mais ma pruderie m'avait abandonnée.  Je laissais ma bite me guider à travers la foule et derrière la porte de la ravissante brune.

Son offre était identique mais cette fois j'ai opté pour le sexe full-options sans hésiter.

Je lui demande de s'allonger directement sur le ventre pour la monter sans attendre.  Mes yeux se sont écarquillés.  Son cul était magnifique.  Le plus beau que j'avais vu jusqu'alors.  Petit, ferme, très doux et parfaitement rebondi.  Elle s'est mise à genoux et ses fesses se sont écartées.  J'étais au paradis.

Vingt minutes plus tard ma dépression avait totalement disparu.  Mon cerveau était lavé de ses tourments.

Ma vie était certes vouée à la médiocrité.  Mes rêves de grandeur ne se réaliseraient sûrement jamais.  Mais quelle importance?

Je venais de voir un cul qui dépassait les plus grandes merveilles et plus rien d'autre ne comptait.


Suddenly Everything Has Changed by The Flaming Lips on Grooveshark
"And it goes fast
You think of the past
Suddenly everything has changed"
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17.2.14

Comment survivre au manque de nicotine


En ce moment je vis comme un moine.  Ça me prend comme ça, de temps en temps.

Pendant deux semaines je n'allume pas la télé.  Je n'utilise mon ordinateur que pour bosser. J'évite la viande aux hormones.

Aucune drogue.  Pas d'alcool non-plus.  Ni de médicaments.  C.L.E.A.N.




Et ça vaut le coup.  Pendant ces deux semaines d'ascèse régénérative je me sens beaucoup mieux.

Je compense par des choses plus saines.  Un livre avec plein de pages dedans remplace la télé et Internet.  Je ne consulte pas mon téléphone de façon compulsive.  Mon esprit se lave de tous ces parasites.

Et mon corps réclame du sport à hautes doses parce qu'il manque de drogues.  Alors je cours. Tous les jours.  Ou je vais nager.  Je perds du poids et prends du muscle.  Moins de sexe aussi, parce qu'à New York alcool = bars = sexe.

Mon compte en banque se renfloue.  Mes couilles se remplissent.  Mon corps se purifie et mon esprit s'éclaircit.  On s'emmerde un peu mais c'est tout bénef'.

Enfin.

Presque.

Le plus dur est de limiter ma consommation de nicotine.  Se passer de nicotine est une pratique masochiste que je ne conseille à personne.

Pendant ma quinzaine monacale j'essaye de tirer le moins possible sur ma cigarette électronique.  C'est-à-dire que j'attends de ne plus pouvoir me retenir d'esquinter le premier passant venu - pas trop balaise non-plus - pour tirer quelques bouffées.

C'est pas évident.  Et ça peut avoir des conséquences désastreuses.  J'en ai récemment fait l'expérience.

C'était en fin de journée.  Je rentrais du boulot et une hésitation m'a saisie juste avant d'entrer dans le métro.

Je ressentais un gros manque de nicotine.  Entre mes bureaux à Chelsea et mon appartement de l'Upper West Side il y en a pour environ 20 minutes de train.

Mais c'était la quinzaine healthy.  J'ai donc décidé de me faire souffrance.  D'attendre d'être rentré chez moi pour me remplir les poumons de liquide Made in China.  C'était une erreur.




Au début ça n'allait pas trop mal.  Fidèle à mon précepte, je lisais mon livre plutôt que de jouer au Sudoku sur mon téléphone.  Minding my own business.

Le train a commencé à se remplir au fil des stations.  Les gens ne me dérangent généralement pas mais je sentais bien que cette fois ça allait être différent.

Deux filles se sont assises en face pour se raconter des ragots médisants sur un de leurs collègues.  Elles terminaient toutes leurs phrases comme si c'étaient des questions.  Ça s'appelle le high-pitched voice.  Un exemple ici avec Miss South Carolina.  Et elles enrobaient le tout dans un vocal fry assez irritant.

Pourquoi ceux qui ont les intonations les plus fatiguantes sont-ils aussi ceux qui parlent le plus fort? Je ne sais pas.  Peut-être est-ce une question de sélection naturelle.  Allez savoir.  Mais je commençais à regretter de ne pas avoir tiré quelques lattes avant d'entrer dans le métro.

Dans dix minutes je n'aurais pourtant plus à les entendre pour le reste de mes jours.  Je me consolais ainsi.

On venait de passer Times Square et le train était maintenant bondé.

Un obèse vint s'asseoir à côté de moi.  Son bourrelet gauche, de la taille d'un beau bébé, reposait allègrement sur mon bras droit.  Je me suis retenu de lui en faire la remarque.  Le pauvre type n'y pouvait rien.  Et s'il avait dû se lever on en avait de toute façon pour une bonne demi-heure.  Faut laisser couler.  Souffle un bon coup et prends sur toi.

Cependant les deux filles continuaient à se brailler leurs histoires dans leurs intonations exaspérantes.  Mes nerfs étaient mis à rude épreuve.

Ceux qui parmi vous sont des fumeurs le savent: manque de nicotine et zen attitude ne vont pas bien ensemble.

Mes mains devenaient moites à mesure que le gros se frottait à mon bras et que les deux greluches me travaillaient le crâne.  Ma mâchoire se crispait au point de faire sauter toutes mes dents.   Mon front suait d'exaspération.

C'est alors que le train a choisi de s'arrêter d'un coup entre deux stations.  Comme ça.  Juste avant la mienne.  Cinq minutes passèrent.  Puis dix minutes.  Un quart d'heure...  Il ne redémarrait pas.  L'attente était interminable.

Les deux décérébrées continuaient leur conversation à tue-tête.  Le type ne cessait de remuer sa graisse contre moi.  Et un gamin à gauche s'était mis à jouer sur son iPhone avec le volume à fond.  J'allais exploser.

J'ai bien tenté un petit coup de méditation.  Respirer profondément.  Fermer les yeux. S'imaginer en train de jouer à poil dans les vagues de Gironde, au couché du soleil.  Mais rien n'y faisait.  Et ce putain de train qui ne bougeait pas d'un pouce!

L'envie de trancher ce bourrelet pour le vider de sa graisse commençait à prendre le dessus. Je voulais fermer le clapet de ces deux mégères et faire bouffer son iPhone à ce sale gosse.  L'air était saturé par la respiration de tous les commuters.  J'étais à bout.

Mais le métro s'est enfin remis en route.  Mon incarcération souterraine touchait à sa fin.  Ce n'était plus qu'une question de minutes avant que je puisse oublier pour toujours ce train qui a bien failli être la scène d'un quadruple meurtre.  Que je puisse respirer un grand bol d'air frais et délivrer mon cerveau agonisant par une bonne dose de nicotine.

Les portes de cette prison sur roues se sont ouvertes.  Et c'est à ce moment qu'un type a jugé bon de m'en bloquer la sortie parce qu'il était trop pressé d'y entrer.  En dépit de tout bon sens et contre tout respect de l'éthique des transports en communs.  Son air idiot m'a achevé.  Et j'ai craqué.

J'ai fixé le mec avec des yeux dont devaient jaillir des éclairs et lui ai hurlé en plein visage "LET ME OFF THE FUCKING TRAIN!!!".  C'est parti tout seul.

Le type a semblé surpris.  Et puis tout est allé très vite.  Il m'a répondu "WHAT'S YOUR FUCKING PROBLEM ASSHOLE?!!" et a tenté de m'en décocher une qui n'est vraiment pas passée loin.

La frustration de toutes les personnes qui venaient de se taper 20 minutes de subway bloqué après une journée de boulot s'est alors déversée sur le pauvre bougre.

Il s'est retrouvé plaqué à terre par deux gros mecs qui le neutralisaient en lui broyant les coudes et les genoux contre le sol.  Sûrement un peu les couilles aussi parce qu'il criait très fort.  Ça faisait mal.





Les téléphones se sont mis à filmer et deux flics sont arrivés en courant.  Comme tout bon Français la police me fait très peur vous savez.  Certaines choses ne changent pas.  J'ai déguerpi sans demander mon reste.

Je ne sais pas ce qu'il est advenu des deux colosses et de notre victime malheureuse.  Aucune mention dans la presse locale.  Ce genre d'incident doit arriver tous les jours.

Mais nous voilà prévenus.  A New York mieux vaut faire gaffe aux Frenchies en manque de nicotine et aux commuters de fin de journée.  Cette combinaison est explosive.

La nicotine aura désormais toute sa place dans mes périodes santé / zen.


Break Stuff by Limp Bizkit on Grooveshark
"No human contact
And if you interact
Your life is on contract
Your best bet is to stay away motherfucker
It's just one of those days!!"
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16.2.14

Les sanglots d'Anita


C'est quand elle m'a dit qu'elle allait sauter par la fenêtre que j'ai décidé de foutre le camp. Chacun ses emmerdes.

Anita est une vraie cinglée.  Elle m'a envoyé un texto désespéré la semaine dernière, deux mois après nos cochonneries de fin d'année.  Un texto sans équivoque avec des photos assez sexy.  Elle me proposait d'aller boire un verre et sûrement beaucoup plus.

Il fait très froid à New York vous savez.  Les poules hibernent.  Moi aussi.  C'est pas la fête niveau sexe.  Alors je me suis dit "pourquoi pas?".


(une des photos)

Je la retrouve en fin de journée dans une Steakhouse de l'Upper East Side.

New York est une ville enjouée mais les Steakhouses sont déprimantes.  L'Upper East Side aussi.  Je comptais sur Anita pour réchauffer cette nuit glacée.

J'entre dans le resto et c'est exactement ce que j'imaginais.  Un bar truffé d'avocats-médecins-businessmen à l'aube du troisième âge.  Entourés de femmes à la quarantaine endormie cherchant à se caser avec un tas de fric.  Une pick-up scene qu'on observe avec une musique de funérailles dans la tête.

Anita m'attendais au bar.  Très séduisante.  Et puis elle a ouvert la bouche.

Elle est apparemment devenue mannequin pour l'agence Ford.  Je n'en croyais pas un mot.  Mais je suis un garçon poli et je feignais d'y croire.  Elle semblait ravie.

Mademoiselle se plaît à se donner des grands airs.  A ses yeux les New Yorkais sont unsophisticated.  Des brutes sans la moindre classe.  Tout ça était dit avec une espèce de dédain dans le regard qui me donnait envie d'avaler mon steak et de foutre le camp.

Mais la fermeté de son petit cul était gravée dans ma mémoire et le mien est resté sagement assis sur sa chaise.  A écouter des histoires qui n'avaient pour autre but que de la faire passer pour la reine de New York City.

Anita se voit comme une fille splendide.  Et c'est vrai qu'elle est belle.  Mais rien qui ne sorte du commun des mortelles à New York.  Elle m'assurait pourtant que tous les hommes de cette ville lui tournaient autour comme des chiens après leur os.

Un certain "surgeon for the head" par exemple.  Un type dont elle a fini par partager la vie après l'avoir largué par deux fois pour cause d'insatisfaction sexuelle caractérisée.

Elle a quitté le pauvre bougre une première fois juste après avoir découvert son petit pénis. Quand le type a sorti son engin au comble de l'excitation elle a explosé de rire en lui disant qu'il serait tout juste bon à se curer les dents.

Elle a quand même décidé de lui donner une seconde chance pour s'apercevoir que le bonhomme ne pouvait limer plus de deux minutes sans se retenir d'envoyer la sauce.  Le pauvre en a repris pour son grade en se faisant cette fois traiter de "little girl".




Mais l'idée de passer quelques années avec un neurochirurgien multi-millionaire ne lui déplaisait pas pour autant.  Surtout si elle pouvait gratter la moitié du magot en passant.  Elle venait donc d'emménager dans son gigantesque appartement sur Park Avenue.  Les raisons de son texto commençaient à s'éclaircir.

Anita commençait à avoir un coup de trop dans le nez et s'est mise à évoquer notre rencontre précédente.  Elle me palpait la bite à travers le pantalon.  En se remémorant tout haut et dans les moindres détails ce qu'elle tenait dans la main.  Elle en parlait beaucoup trop fort. Surprenant pour une fille qui se donne des airs de comtesse des Carpathes.

C'était marrant quand les seuls à l'entendre s'émoustiller étaient les trois types qui tendaient l'oreille juste derrière nous.  Mais quand tout le bar était mis au fait de mon intimité tout ça devenait franchement gênant.

C'est alors qu'elle m'a lâché: "you and me it's just for fun".  Enfin une bonne nouvelle.  Je n'en demandais pas tant.  Et surtout pas plus.

Mais il était déjà tard, j'étais fatigué par mon petit bourdon hivernal et on m'attendait à la maison.  On a donc pris rendez-vous pour la semaine suivante.  Dans un palace de 59th Street où elle se chargeait de réserver une chambre.  Ca devenait intéressant.

Je me pointe chambre 806 quelques jours plus tard et elle avait sorti le grand jeu.  Petite robe rouge.  Bas noirs.  Talons hauts.  Une pute de luxe...  Mais à l'oeil.

Je débouche une bouteille de champagne qu'on a descendu en quinze minutes.  Elle me dégrafe le pantalon alors que j'ouvrais la seconde et engouffre ma bite dans sa bouche.  Avec les deux mains.  En gémissant.  Elle était morte de faim.

Se vautrer dans le luxe de cette chambre de palace.  Le champagne qui me montait à la tête.  La pipe qui faisait l'objet de sa plus grande application.  Sa petite robe qui laissait entrevoir le haut de ses bas.  Tout ça m'a rendu dingue.  J'ai perdu tout contrôle.

Alors je l'ai penchée en avant sur le canapé et j'ai retroussé sa petite robe.  J'ai fait glisser son string le long de ses bas et l'ai pénétrée aussi profond que je pouvais.  Je la défonçais sans m'arrêter.  Elle mouillait le long de ma jambe.  Elle criait très fort.  Elle a jouit très vite.

Je l'ai ensuite portée sur le lit pour la baiser dans tous les sens.  A chaque fois qu'elle était sur le point de jouir les pires saloperies lui sortaient de la bouche.  "French bitch".  "Filthy cunt".  Celles dites en croate étaient sûrement pires.

Elle m'insultait et elle hurlait de plaisir.  Je n'avais jamais entendu une fille jouir si longtemps. Ou si cradement.

Après chaque orgasme elle riait en reprenant son souffle et me suppliait de continuer à la défoncer encore plus fort.  Crazy in the head, crazy in the bed comme ils disent.  J'ai fini par lui éjaculer sur tout le visage comme elle me le demandait expressément.  Un garçon poli.

Cette baise-marathon m'a ensuite plongé dans un profond sommeil.  Mais j'ai été réveillé par des sanglots.  Les sanglots d'Anita.

Elle était affalée dans le fauteuil et pleurait à grosses larmes.  Je lui ai demandé ce qui n'allait pas.  Elle a fini par se confier en descendant la seconde bouteille de champ'.



"Ma vie est un enfer.  Tout ce que je sais faire c'est séduire des hommes riches.  Faire en sorte qu'ils tombent amoureux.  Et partir.   
Je me suis mariée avec le premier.  Il était Américain.  Et raisonnablement blindé. Je ne l'ai jamais aimé.   
Ca m'a permis d'obtenir une green-card et un peu d'argent quand on a divorcé.  C'était pas assez.  J'ai déjà tout dépensé.  Maintenant il m'en faut un autre et je l'ai trouvé.  On va se marier.  Il est beaucoup plus riche que le premier.  Je l'aime encore moins."

Une pute de luxe je vous dis.  Un petit côté Satan en prime.  Je ne cherche pas à me donner le beau rôle dans cette histoire parce que je n'ai rien d'un saint mais cette fille me donnait la nausée.

"Je veux que toi et moi on continue à se voir.  Comme ça, à l'hôtel.  Qu'on s'amuse.  Qu'on dépense son argent ensemble.  Et quand j'en aurai la moitié, peut-être qu'on se mettra ensemble qui sait?  Je veux qu'on fasse ça tous les deux."

Ses délires commençaient à me taper sur les nerfs.  Toute sa personne commençait à me taper sur les nerfs.  Je l'avais trop entendue.  Je ne me serais jamais permis de la juger mais elle me demandait mon avis et tentait de m'impliquer dans ses plans tordus.  Je le lui ai donné sans la ménager.

Elle m'a dit qu'elle se jetterait par la fenêtre si je parlais sérieusement.  C'est alors que je suis sorti de cette chambre qui sentait le sexe comme la grotte de deux bêtes sauvages.  Chacun sa vie.


5446 That's My Number / Ball and Chain by Sublime on Grooveshark
"Give it to me, one time, 
Give it to me, two times,
Give it to me, three times,
Give it to me,  four times"
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12.2.14

Comment niquer non-stop sans être un connard


Dans un monde parfait les choses se passeraient ainsi :

Vous rencontrez une fille et elle vous plaît.  Vous lui dîtes que vous feriez bien un tour sous ses draps.  Mais qu'elle ne sera pas votre copine.  Ce n'est pas ce que vous cherchez.

La fille apprécie votre franchise.  Elle-aussi vous aime bien.  Alors vous rentrez ensemble.



Les choses sont claires dès le début.  La fille n'entend pas cette petite voix lui marteler "ET SI C'ÉTAIT LE BON??".  Les attentes sont conformes à la réalité.  Personne ne se retrouve avec le coeur brisé.

Mais ce monde n'est pas celui dans lequel nous vivons.  Un type agissant ainsi ferait aussi bien de se couper la bite et de s'en faire un steak.

Il faut donc mentir.  Souvent avec une force de conviction proportionnelle à la taille du décolleté auquel on s'adresse.

Il faut mentir parce que sinon elles partiraient.  Et ce serait dommage.  La sincérité est un cadeau qui coûte très cher.

C'est comme ça.  Un homme doit susciter l'espoir dans un coeur délicat pour tirer son coup.  Et finalement faire souffrir une fille dont la beauté l'a chatouillé dans le pantalon.

Grâce à ces arrangements avec la vérité j'en suis arrivé à baiser à volonté.  Dans l'abondance d'une ville qui rend tout ça assez facile.

Mais quand même.  Ca commence à peser.

Personne n'aime faire souffrir une fille et moi non-plus.

Alors dorénavant c'est décidé.  Je croque une fois et je dis la vérité.  En tous cas je vais essayer.  Quitte à bouffer du steak beaucoup trop dur.


Perfect World by Sublime on Grooveshark
"And I see LIES, corruption, look this way, 
Girly on the corner, but she's not okay."
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7.2.14

Un weekend à Miami


Sur le chemin de l'aéroport j'ai vu une voiture garée dans un bloc de glace.  La neige l'a complètement recouverte dans la journée et s'est changée en glace dans la nuit.

Il fait froid à New York.

Du coup je me casse à Miami pour le weekend.  Je vais y retrouver deux amis de France.




C'est sympa Miami.  Surtout en hiver quand j'ai besoin d'un peu de soleil.  De chaleur.  C'est à trois heures d'avion et ça en vaut chaque seconde.

En ce moment il fait 30°.  L'eau est à 26.  Et si vous sortez des trois avenues touristiques Miami a du "flavor".

Ca respire la culture latinos.  Les rythmes cubains vous résonnent dans la tête.  L'odeur du rice and beans vous emplie les narines.  Ca parle español avec la langue qui claque et les hanches qui remuent.  Et les Latinas...  J'ai toujours eu un gros faible pour les Latinas.

Miami est aussi la ville du show off.  C'est à celui qui aura la plus belle voiture.  Les plus gros seins, quitte à ce qu'ils soient en plastique.  A qui sera le mieux sapé.

New York est différente.  On s'y dépouille du superficiel.  On se concentre sur l'essentiel.  Personne n'a de voiture.  Seuls les mecs du ghetto portent des chaussures Prada.  Ce qui compte c'est ce que vous faîtes de votre vie.  Ce que vous avez à dire.

Mais putain ce qu'il fait froid.


It Was a Great Day by DJ Drama And Pharrell on Grooveshark
"Today was a good day"
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3.2.14

Connard de capitaliste


Vous connaissez Bitcoin?  C'est comme du cash, mais pour Internet.  Un génie de la Silicon Valley explique tout ici et .

En gros ça pourrait bien tout faire péter.  Je voulais donc des bitcoins.




Pour en obtenir il faut en acheter sur une plateforme d'échange.  Ca prend plusieurs jours.  Et elles sont bourrées d'arnaques.  Autant qu'un souk à touristes.

Je me suis donc tourné vers la méthode Made in New York.  La bourse d'échange en plein air.  Ca se passe à Union Square Park tous les Lundis soirs et c'est très simple.

Vous donnez du cash à un type qui a des bitcoins et il vous en transfère pour un montant équivalent sur votre compte.  Vous vérifiez que vous avez les bitcoins depuis votre téléphone.  Vous lui donnez votre billet.  Pouf c'est fait.

J'en ai acheté pour $200.  Histoire de.

Mon dealer avait bien 60 ans.  Une longue barbe blanche et un look aristo-intello.  Un vrai dingue de ces pièces virtuelles.

Il était convaincu qu'elles représentaient la monnaie du futur.  Il en possédait pour un montant équivalent à la moitié de ses économies pour une raison très simple: il n'accordait aucune confiance au système.

La FED et d'autres banques centrales allaient tout faire pour dévaluer le dollar.  L'apocalypse nous attendait au tournant.  Mais Bitcoin - un peu comme l'or - représentait selon lui une valeur indépendante de tout pouvoir.  Une valeur plus sûre, malgré la spéculation.  J'avais affaire à un anarcho-libertaire.

La bourse aux bitcoins fermait et il m'a demandé de m'assoir à-côté de lui.  Pour discuter.  C'est une de mes traditions new yorkaises préférées.

Le type me demande comment je suis arrivé à New York.  Je lui raconte mon histoire.  Comment je suis venu de Paris où je bossais "dans la finance".  Et comment je suis arrivé à New York il y a quatre ans pour y créer mon propre fond.

Il me fait alors part de son sentiment:

"- You people make me sick.
- .....  What did you say??
- Je t'écoute et je me rends compte à quel point je déteste l'Amérique.  Je déteste ce pays qui ne pense qu'au fric et impose ses visions au reste du monde.  Je déteste les gens comme toi".

J'étais surpris par la violence de sa réponse.  Surpris aussi de sentir mon poing se fermer dans ma poche.  Prêt à dégainer.  Je n'ai jamais été un garçon violent et certainement pas un casseur de petits vieux.

Déjà c'est quoi ce "you people"?  On était assis en plein coeur de New York City et il serait impossible de trouver deux personnes pour partager la même opinion sur quoi que ce soit.

"Ok c'était peut-être un peu exagéré.  Mais regarde autour de toi.  J'ai grandi ici et ce quartier avait une âme.   
Il y avait des 'Mom and Pop stores' à chaque coin de rue.  Aujourd'hui ce ne sont que des Starbucks, des Whole Foods et des Bank of America.  This neighbourhood is an abortion"

C'est facile de détester le libéralisme.  De détester les iPhones fabriqués par des enfants en Chine.  De détester les traders de 20 ans qui ajoutent six zéros à leur compte en banque tous les ans.  De détester toutes les pubs qui infestent nos vies.

Et c'est vrai que le capitalisme uniformise le monde.  Qu'il l'aseptise.  Et en retire peut-être un certain romantisme.

Mais les gens parlent parfois comme si l'homme vivait un âge d'or avant le libéralisme.  Que tout était mieux avant.  Plus "vrai".

Si notre hippie sur le retour passait 20 minutes dans une usine de la fin de XIXè siècle il bloggerait sur la Fashion Week pour le reste de ses jours.

Je lui ai dit combien j'adorais le libéralisme.  Même s'il est très loin d'être parfait.

Combien j'adorais le fait de ne pas avoir à mourir de la tuberculose à 40 ans par exemple.

J'adore la justice sociale aussi.  La sécu pour tous.  L'école gratuite.  Et la nature.  J'adore manger des champis au milieu de la forêt en été.  La dernière fois j'ai réalisé que tout émettait exactement le même son.  Tout est fait d'atomes et les atomes vibrent.  Et l'Univers est lié par le son de cette vibration qui unifie le monde.

Il n'empêche.  J'adore le libéralisme.  Il offre des possibilités comme nous n'en avons jamais connues.  Il rend la vie excitante.  Et plus confortable.  Quel plaisir quand même d'aller au boulot sans craindre de se faire bouffer par un lion.  Ou de ne pas avoir à se faire amputer d'un bras quand on se coupe au doigt.  Enfin.

Nous avons ensuite discuté pendant deux bonnes heures.  De tout et de rien.  Le personnage était brillant.  Il parlait neuf langues, avait voyagé à travers le monde et en savait bien plus que moi sur à peu près tout.

Je ne peux vous révéler son nom car ce post ne rend justice ni à notre discussion - qui a duré deux heures - ni à son intelligence.  Mais en rentrant chez moi j'ai recherché son nom sur Google.  Il s'agissait d'un des mathématiciens les plus respectés au monde.


American Pig by Sugar Ray on Grooveshark
"Put your food in your mouth but the hole is too big [...]
We get our culture from a mini mall, fuck inside a bathroom stall"
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