Je venais de démissioner. L'angoisse me bouffait désormais toutes mes forces.
Mes journées consistaient essentiellement à regarder passer les heures dans ma petite chambre parisienne.
J'observais parfois la lumière du soleil filtrer à travers le rideau bleu marine. Elle révélait de petites tâches. Des tâches de sperme. On aurait dit des îles qui se détachaient sur l'océan bleu du rideau. Je scrutais, pensif, la carte de ma misère.
La mélancolie ne m'avait même pas laissé une petite serviette dédiée à la masturbation. J'éjaculais simplement sur le rideau à longueur de journées. Il fallait bien se rendre à l'évidence: la dépression commençait à s'installer.
Je refusais de voir mes amis. Ma copine de l'époque avait déménagé en Suisse. J'étais censé la rejoindre mais je faisais trainer les choses. Mon rideau de sperme séché a fini par me convaincre qu'il était temps de partir.
Au début ça n'allait pas trop mal. Un peu mieux même. Quand elle rentrait le soir mon angoisse me laissait un peu de répit et c'était très agréable.
Mais ça n'a pas duré.
Juste après avoir emménagé je me suis aperçu qu'elle me trompait avec un de ses collègues. J'ai craqué. Je n'avais plus de boulot. Plus d'envie. J'attaquais la dernière moitié de la vingtaine sans le moindre plan de vie. Et ma copine adultère venait compléter un tableau déjà pas très glorieux.
Je ne lui ai pas dit que je savais. Elle devait partir pour une semaine et je planifiais consciencieusement quelques jours de débauche vengeresse.
Gentleman, je l'ai accompagnée à l'aéroport de Genève le jour de son départ. Embrassée tendrement en lui souhaitant bon voyage. Puis je suis rentré à la maison, j'ai jeté quelques affaires dans un sac de sport et j'ai pris la route pour Amsterdam.
Faire de la route est un vrai plaisir. Il existe un romantisme mystérieux à voyager sur de longues distances. Quelque chose d'exaltant qui incite au rêve et donne envie de pousser la musique à fond. Mais aujourd'hui c'était différent. La peur des lendemains et mon désastre sentimental me coupaient toute envie. Un silence de mort régnait dans la voiture ainsi que dans ma tête.
Et puis il s'agissait quand même de traverser la Belgique. L'après-midi commençait à peine mais il faisait déjà presque nuit. Le ciel était noir. Le paysage désolé défilait lentement sous mes yeux. J'avais l'impression de conduire vers nulle part. A travers des champs lugubres et trempés de larmes. Ce trajet ressemblait de plus en plus à ma misérable existence.
Les sinistres kilomètres s'enchaînaient les uns après les autres. Ils me faisaient ruminer le passé, détester le présent et craindre l'avenir. J'avais de plus en plus de mal à respirer. Je me sentais emprisonné par le vide. Et pour la première fois de ma vie j'ai été foudroyé par une crise de panique. Une vraie.
C'est de très loin la pire sensation que je connaisse. Votre respiration se coupe. Votre coeur bat à cent à l'heure. La réalité se change en cauchemar. Vous sentez votre corps vous lâcher et je pensais vraiment être en train de mourir. En Belgique. Je ne voulais pas mourir en Belgique.
La crise a peut-être duré vingt minutes et il m'a fallu m'assoupir quelques heures avant de pouvoir reprendre la route. Terrifié par le fait que ça puisse recommencer. Mais quand même impatient de découvrir Amsterdam.
Je suis arrivé en pleine nuit et me suis trouvé une petite chambre sans chauffage dans un petit hôtel bon marché.
Le lendemain j'ai erré toute la journée à travers les rues de la Venise du Nord. Cette ville est une splendeur. Je n'avais jamais rien vu d'aussi beau. Je me suis promis d'y retourner un jour avec une personne que j'aimerai.
Je déambulais entre les canaux en fumant pétard sur pétard. J'entrais dans chaque bar que je trouvais et y buvais quelques bières. J'étais complètement défoncé. Et toujours angoissé. Mais je ressentais aussi quelque chose de bizarre. Quelque chose qui ressemblait à du bonheur. Je me suis évanoui sur un banc et je crois bien que mes lèvres dessinaient un sourire.
Le soir tombait. Je commençais à reprendre mes esprits. L'heure de ma vengeance approchait. Elle serait délicieuse et beignée de lumières rouges.
J'avais la vingtaine innocente vous savez. Aller voir une PROSTITUÉE me faisait peur. Ça me mettait très mal à l'aise. Je jetais des coups d'oeil timides dans chaque vitrine parce que je sentais que les badauds me regardaient comme un gros dégueulasse. Ce n'était évidemment que mon imagination. La renommée du Red Light District ne tient pas à la pureté de ses moeurs.
Deux filles m'intéressaient tout particulièrement. Une très belle brune dont la vitrine se trouvait dans une rue bondée. Et une blonde vraiment sexy quelques rues plus loin. Mon choix a été celui de la discrétion. Mon pénis, tel la baguette d'un sourcier, me guidait fermement vers la seconde.
Mon coeur battait la chamade et j'ai finalement poussé la porte de la blonde aguicheuse pour pénétrer sous ses lumières rouges.
"It's 50 euros for 20 minutes. If you also want to touch me it's 75".
J'étais au chômage. Fauché comme les blés. Le sexe sans les mains fera l'affaire.
Elle ne portait qu'un sting noir et de hautes chaussettes en laine. Ce type de chaussettes est un fantasme depuis ma puberté. Mon pantalon s'est vite retrouvé sur les miennes. J'étais très excité.
Mon hôtesse a étendu une serviette sur le lit et elle m'invitait à m'allonger. Elle s'est mis à me sucer avec sa petite bouche et ses petites mains. Tous mes problèmes disparaissaient peu à peu. Elle pompait mon désespoir hors de mes entrailles et j'aurais pu l'épouser sur le champ.
Mais je sentais bien qu'il était plus convenable de la retourner sur le ventre pour la prendre par derrière. Pourtant, ma duclinée s'y opposait.
"For doggystyle it's 75 euros. You have to pay more".
Ce sera donc du sexe en étoile de mer. Très bien. Elle s'est mise sur le dos les jambes écartées et je me suis activé. Mais les aiguilles tournaient très vite et elle m'a indiqué que sa prestation touchait à sa fin. Beaucoup trop tôt pour une bite emballée sous plastique.
"Wait, I'm almost there" ai-je supplié.
"No. Your time is up. You pay more or you get out". Et elle se lève en tendant la main.
J'ai immédiatement retiré la capote et entrepris de me branler frénétiquement mais ce n'était pas du goût de la belle blonde.
"You get out! I'll open the curtain and everybody will see you. Out!"
Il a fallu tout remballer et quitter ma bien-aimée avec une trique d'enfer. Ma troisième jambe me faisait boiter le long du canal et c'est la démarche mal assurée que je me suis précipité vers la seconde vitrine.
La petite rue était noire de monde mais ma pruderie m'avait abandonnée. Je laissais ma bite me guider à travers la foule et derrière la porte de la ravissante brune.
Son offre était identique mais cette fois j'ai opté pour le sexe full-options sans hésiter.
Je lui demande de s'allonger directement sur le ventre pour la monter sans attendre. Mes yeux se sont écarquillés. Son cul était magnifique. Le plus beau que j'avais vu jusqu'alors. Petit, ferme, très doux et parfaitement rebondi. Elle s'est mise à genoux et ses fesses se sont écartées. J'étais au paradis.
Vingt minutes plus tard ma dépression avait totalement disparu. Mon cerveau était lavé de ses tourments.
Ma vie était certes vouée à la médiocrité. Mes rêves de grandeur ne se réaliseraient sûrement jamais. Mais quelle importance?
Je venais de voir un cul qui dépassait les plus grandes merveilles et plus rien d'autre ne comptait.
"And it goes fast
You think of the past
Suddenly everything has changed"
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