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11.9.14

Vivre ailleurs


Le livreur est passé à la maison le weekend dernier - pour m'apporter une petite boîte toujours très bienvenue.

Il pose son sac sur la table.  Me sort la sélection du jour.  Je choisis la boîte.  Il encaisse ses $60 puis referme son sac avec un cadenas.  Tiens, avec un cadenas?  J'avais jamais remarqué.  Alors je lui demande:

"Why the padlock?" 
"Parce que si les flics veulent fouiller mon sac, ils doivent le déchirer.  Et ils ne peuvent pas le déchirer.  They would violate my rights" 
"Ah...  Ok...  Mais tu fais quoi quand ils te demandent de sortir la clef?" 
"Je leur dis que j'ai pas la clef.  La seule façon de vérifier serait de me fouiller.  Et ils ne peuvent pas me fouiller.  They would violate my rights".



C'est beau putain.  Vous imaginez ça une seconde en France, patrie de l'abus-de-tout-petit-pouvoir?

Personnellement j'ai passé deux longues nuits de garde à vue dans notre douce France.   En charmante compagnie policière.  Au fin fond de cellules froides.  Le nez baignant dans la pisse.  Et à chaque fois pour avoir fumé un joint dans une rue déserte, en pleine nuit.  Le mépris du citoyen.

Enfin.  Tout ça c'est terminé.  Parce que pour tout vous dire, j'aime mon pays mais je ne suis vraiment pas près d'y revenir.

C'est pas trop la fête en ce moment hein?  C'est ce que j'entends tout le temps au téléphone.  La morosité qui bat des records.  Les gens plus cons que jamais.  Difficile à croire mais c'est pourtant le cas.  Putain je suis pas près de rentrer.

Le truc c'est que ça a toujours été pareil.  Les emmerdes d'aujourd'hui sont celles d'hier, mais en pires.  Et aussi celles de demain, qui seront encore pires.  Parce que la France est constipée.  On ne fait rien et la merde s'accumule.

Alors chacun y va de son grain de sel.  De ses explications toujours biaisées.  L'implacable mondialisation.  L'immigration.  La perte de repères et autres foutaises.

Mais la vérité est que si la merde s'accumule à ce point en France, année après l'autre, siècle après l'autre, c'est à cause de notre maladie collective.  De notre immobilisme.  Et de notre rigidité.

Marianne ressemble de plus en plus à un vieillard aigri et bourré de Viagra.  Collé dans son fauteuil à longueur de journées mais avec une trique bien raide.  Immobile et rigide.



Pourquoi cet immobilisme?  Parce qu'en France personne n'est jamais d'accord avec personne.  Chacun est convaincu d'avoir raison du haut de sa petite fierté mal-placée.

C'est très difficile de diriger un tel pays.  Vous remarquerez d'ailleurs que les années de gloire en France sont aussi celles où un dictateur était à sa tête.  Un vrai dictateur.  Un type avec qui il n'y avait pas à discuter.

T'es pas d'accord?  A la trappe.  Et comme le Français n'est pas très vaillant tout le monde se mettait vite d'accord.  Et le pays pouvait avancer.

Cette époque est révolue.  Mais la démocratie ne fonctionne vraiment que chez des peuples responsables.  Ou assez demeurés pour avaler tout ce qu'on leur dit.

Le Français n'est ni responsable, ni demeuré.  Sarkozy avait bien essayé de mener tout le monde au baton mais regardez où on en est...

Alors je vais vous dire.  Des convictions je n'en ai pas beaucoup, mais laissez-moi en partager une avec vous.

Hollande est le début de la fin.  La première étape d'une France qui baisse les bras.  De la France qui a peur.  Qui a peur du reste du monde.  De la modernité.  Du progrès.  De ce qui change.

Une France qui se referme sur elle-même et qui coulera sous son propre poids.  Paralysée de panique.  La seconde étape?  Je préfère ne pas y penser.  En bon Français.

Aujourd'hui je ne me rends plus dans mon pays que comme un touriste.  Et laissez-moi vous dire que ce pays est fabuleux quand on n'y vit pas.

C'est un temple de beauté.  Ses paysages, ses villes, son Histoire, surtout intellectuelle, donnent le vertige.  Un royaume de spendeurs.  Il n'y a rien que je préfèrais à flâner dans les rues de Saint-Germain.  Ou à traverser le pays vers des coins de paradis qui se comptent par milliers.

Mais qu'il est bon de vivre ailleurs.


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"I still love her
loved her more when she used to be sober and I was kinder"

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