Vous connaissez Bitcoin? C'est comme du cash, mais pour Internet. Un génie de la Silicon Valley explique tout ici et là.
En gros ça pourrait bien tout faire péter. Je voulais donc des bitcoins.
Pour en obtenir il faut en acheter sur une plateforme d'échange. Ca prend plusieurs jours. Et elles sont bourrées d'arnaques. Autant qu'un souk à touristes.
Je me suis donc tourné vers la méthode Made in New York. La bourse d'échange en plein air. Ca se passe à Union Square Park tous les Lundis soirs et c'est très simple.
Vous donnez du cash à un type qui a des bitcoins et il vous en transfère pour un montant équivalent sur votre compte. Vous vérifiez que vous avez les bitcoins depuis votre téléphone. Vous lui donnez votre billet. Pouf c'est fait.
J'en ai acheté pour $200. Histoire de.
Mon dealer avait bien 60 ans. Une longue barbe blanche et un look aristo-intello. Un vrai dingue de ces pièces virtuelles.
Il était convaincu qu'elles représentaient la monnaie du futur. Il en possédait pour un montant équivalent à la moitié de ses économies pour une raison très simple: il n'accordait aucune confiance au système.
La FED et d'autres banques centrales allaient tout faire pour dévaluer le dollar. L'apocalypse nous attendait au tournant. Mais Bitcoin - un peu comme l'or - représentait selon lui une valeur indépendante de tout pouvoir. Une valeur plus sûre, malgré la spéculation. J'avais affaire à un anarcho-libertaire.
La bourse aux bitcoins fermait et il m'a demandé de m'assoir à-côté de lui. Pour discuter. C'est une de mes traditions new yorkaises préférées.
Le type me demande comment je suis arrivé à New York. Je lui raconte mon histoire. Comment je suis venu de Paris où je bossais "dans la finance". Et comment je suis arrivé à New York il y a quatre ans pour y créer mon propre fond.
Il me fait alors part de son sentiment:
"- You people make me sick.
- ..... What did you say??
- Je t'écoute et je me rends compte à quel point je déteste l'Amérique. Je déteste ce pays qui ne pense qu'au fric et impose ses visions au reste du monde. Je déteste les gens comme toi".
J'étais surpris par la violence de sa réponse. Surpris aussi de sentir mon poing se fermer dans ma poche. Prêt à dégainer. Je n'ai jamais été un garçon violent et certainement pas un casseur de petits vieux.
Déjà c'est quoi ce "you people"? On était assis en plein coeur de New York City et il serait impossible de trouver deux personnes pour partager la même opinion sur quoi que ce soit.
"Ok c'était peut-être un peu exagéré. Mais regarde autour de toi. J'ai grandi ici et ce quartier avait une âme.
Il y avait des 'Mom and Pop stores' à chaque coin de rue. Aujourd'hui ce ne sont que des Starbucks, des Whole Foods et des Bank of America. This neighbourhood is an abortion"
C'est facile de détester le libéralisme. De détester les iPhones fabriqués par des enfants en Chine. De détester les traders de 20 ans qui ajoutent six zéros à leur compte en banque tous les ans. De détester toutes les pubs qui infestent nos vies.
Et c'est vrai que le capitalisme uniformise le monde. Qu'il l'aseptise. Et en retire peut-être un certain romantisme.
Mais les gens parlent parfois comme si l'homme vivait un âge d'or avant le libéralisme. Que tout était mieux avant. Plus "vrai".
Si notre hippie sur le retour passait 20 minutes dans une usine de la fin de XIXè siècle il bloggerait sur la Fashion Week pour le reste de ses jours.
Je lui ai dit combien j'adorais le libéralisme. Même s'il est très loin d'être parfait.
Combien j'adorais le fait de ne pas avoir à mourir de la tuberculose à 40 ans par exemple.
J'adore la justice sociale aussi. La sécu pour tous. L'école gratuite. Et la nature. J'adore manger des champis au milieu de la forêt en été. La dernière fois j'ai réalisé que tout émettait exactement le même son. Tout est fait d'atomes et les atomes vibrent. Et l'Univers est lié par le son de cette vibration qui unifie le monde.
Il n'empêche. J'adore le libéralisme. Il offre des possibilités comme nous n'en avons jamais connues. Il rend la vie excitante. Et plus confortable. Quel plaisir quand même d'aller au boulot sans craindre de se faire bouffer par un lion. Ou de ne pas avoir à se faire amputer d'un bras quand on se coupe au doigt. Enfin.
Nous avons ensuite discuté pendant deux bonnes heures. De tout et de rien. Le personnage était brillant. Il parlait neuf langues, avait voyagé à travers le monde et en savait bien plus que moi sur à peu près tout.
Je ne peux vous révéler son nom car ce post ne rend justice ni à notre discussion - qui a duré deux heures - ni à son intelligence. Mais en rentrant chez moi j'ai recherché son nom sur Google. Il s'agissait d'un des mathématiciens les plus respectés au monde.
"Put your food in your mouth but the hole is too big [...]
We get our culture from a mini mall, fuck inside a bathroom stall"
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