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1.9.15

Des paires de putes


Déjà vous perdrez vos amis les plus proches. Puis vos rêves. Et enfin vous vous perdrez vous-mêmes.

C'est comme ça quand on se focalise sur un point trop précis. Parce que si le centre d'une vie est trop petit, c'est toute la vie qui devient amère. Et très vite on se retrouve tout seul et sans rien.

C'est tellement facile de tomber dans le piège de restreindre toute sa vie à un point tout petit. En étant obsédé par un but trop spécifique par exemple. Si précis qu'on en oublie le reste du monde.

Ou bien en se raidissant sur son petit monde et ses petites valeurs en méprisant celles des autres. En oubliant qu'il existe un autre monde que celui dans lequel notre petite tête s'est formée. En sacrifiant toute curiosité au profit de ses petits principes.

Bref. Dans tous les cas on perd sa hauteur de vue. On focalise sa vie sur un point trop limité et c'est le meilleur moyen de devenir aigri. De se rendre l'âme amère. Et de passer pour un con aussi.

Je le sais parce que j'ai longtemps été ce type.

Obnubilé par sa carrière. Fier de sa cravate. Sa prochaine promotion pour unique horizon. Et chaque jour mon esprit se refermait un peu plus. Il étouffait. Devenait claustrophobe. Hostile. J'étais fier mais surtout aigri et malheureux.

C'est ce qui arrive quand on se met des oeillères. On perd sa curiosité. Le monde rétrécit. Et on devient amer et blasé.

Certains de mes amis sont ainsi. Laser-focused sur leur carrière. C'est leur principale source d'intérêt. Ils ont grandi avec leur réussite pour seul horizon.

Ils sont avocats ou bossent a Wall Street et sont so successfull. Mais ne s'intéressent à rien ou presque à part leur boulot. Ils ne savent rien faire d'autre. Ne fréquentent que des gens comme eux. Ne lisent que des bouquins qui se rapportent à leur travail, etc.

Alors ils baisent des paires de putes et se défoncent avec tout ce qui leur passe sous la main pour se trouver une source d'intérêt. J'espère que vous n'êtes pas trop comme ça. C'est pas aussi marrant que ça en a l'air.



Mais ce n'est pas le pire. Il y a des gens dont la vision est encore plus restreinte. Et qui sont donc encore plus aigris et hautains. Ces gens, on en croise par milliers à New York. Ce sont les narcissiques.

Ils sont à l'écoute obsessive d'eux-mêmes. De leurs feelings. A l'affût du moindre petit muscle qui leur pousse sur le corps.

Ces gens qui ne parlent que d'eux-mêmes sont souvent les plus aigres. Et les plus seuls. Et malheureux. Parce que le plus petit point sur lequel focaliser sa vie, et ben c'est soi-même. Leur esprit étouffe à force de ne penser qu'à une chose. Eux-mêmes.

Mais c'est pas non-plus toujours de leur faute. On nous dit tout-le-temps qu'il faut être le meilleur de nous-mêmes, en particulier ici à New York. Le self-improvement est un modèle absolu. Et c'est pas forcément une mauvaise chose.

Mais il existe un revers à toutes ces médailles qu'on se décerne.

Ce revers, c'est un monde où le narcissisme devient la norme. Où le monde de chacun se rétrécit à soi.

Où les esprits se renferment et les âmes sont amères. On devient jaloux. Les gens s'évitent.

Où on ne peut plus écouter quelqu'un parler sans penser à autre chose qu'à ce qu'on va lui répondre.

Où on se compare constamment aux autres en oubliant de vivre sa propre vie.

Où les petites filles sont élevées comme des princesses qui grandissent en de véritables emmerdeuses.

On est obnubilé par soi. Par ses petites certitudes. Les autres ne sont que d'autres paires d'yeux par lesquels on se regarde. On s'intéresse beaucoup plus à ce que l'on ressent (à soi) qu'à ce que l'on pense (au reste du monde).

Mais le paradoxe c'est que le meilleur moyen de s'améliorer c'est encore par l'humilité. La curiosité à l'égard du monde. Et le meilleur moyen de recevoir est encore de donner sans forcément en attendre plus en retour. Ça sonne con comme ça, je sais. Mais essayez. Ça marche.

Je discutais de ça il n'y a pas longtemps avec un petit vieux assis dans un grand parc. Il m'a dit que s'il avait appris une chose dans sa vie, c'est qu'on était la moyenne des 4-5 personnes qu'on fréquentait le plus.

Alors j'essaye de penser à des choses qui dépassent le cadre de ma vie immédiate. De mon boulot. De mes petites certitudes. De ma petite personne.

C'est pas toujours facile. Mais je voudrais pas être la moyenne d'un unique connard à empaler sur son clocher.


"Maudits soient ces enfants de leur mère patrie
Empalés une fois pour tout's sur leur clocher"


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